CAN Féminine 2024 / Bakari Shime (Tanzanie) : “Je suis inspiré par toutes les femmes entraîneures.”

- Quinze ans après sa dernière apparition, la Tanzanie retrouve la CAN Féminine CAF TotalEnergies avec un projet bâti sur la jeunesse et la continuité
- À la tête des Twiga Stars, Bakari Shime mise sur l’héritage des U17 et une génération formée en interne depuis 2019
- Inspiré par les femmes entraîneures du continent, il vise la Coupe du Monde 2027 et appelle au soutien de tout un pays
Dans les couloirs feutrés de la Fédération tanzanienne, Bakari Shime a pris un pari fou : rebâtir une sélection nationale féminine disparue des radars depuis plus d’une décennie. Quinze ans après la dernière participation des Tanzaniennes à la CAN Féminine CAF TotalEnergies, l’entraîneur revient sur le devant de la scène avec une équipe transformée, un projet mûri, et une idée fixe : remettre son pays au cœur du football féminin africain.
Ce retour en force n’a rien d’un hasard. Derrière la qualification, il y a un plan. Structuré, pensé dès 2019, il s’appuie sur la jeunesse : des U17 aux seniors, chaque catégorie a servi de tremplin à la suivante. Résultat, une génération complète de joueuses a grandi dans un système cohérent, passant progressivement d’un maillot à l’autre. “Tout a commencé avec les jeunes”, dit-il calmement, presque comme une évidence. Sauf qu’en Afrique, peu de fédérations ont misé aussi tôt et aussi clairement sur le long terme.
Aujourd’hui, la Tanzanie débarque dans un groupe relevé, avec l’Afrique du Sud, le Ghana et le Mali. Trois géants, trois histoires, et face à eux, une nation en pleine ascension. Et comme un signe des temps, ce n’est pas seulement le football à 11 qui fait parler : les Tanzaniennes se sont aussi qualifiées pour la Coupe du Monde de futsal, preuve que l’élan dépasse les catégories et les formats.
Face à l’adversité, Bakari Shime refuse pourtant les discours tremblants. Il préfère parler d’apprentissage, de détermination et de transmission. Et surtout, il affirme avec fierté que les modèles sont là, sur le continent, dans les staffs féminins qui dessinent le football de demain. Son regard est tourné vers l’avenir. Celui de son équipe. Et celui de toute une génération.
Dans un entretien exclusif avec CAFOnline.com, le tacticien tanzanien évoque ses inspirations et ses ambitions avant le coup d’envoi de la Coupe d’Afrique des Nations Féminine CAF TotalEnergies, Maroc 2024.
CAFOnline.com : La Tanzanie est dans le Groupe C avec l’Afrique du Sud, le Ghana et le Mali. Quelle est votre impression ?
Bakari Shime : Pour moi, ce sera un groupe très, très difficile. Nous allons affronter deux adversaires très forts, notamment le Mali qui a participé plusieurs fois à la CAN Féminine, et bien sûr l’Afrique du Sud, tenante du titre. Je m’attends à un groupe vraiment relevé.
À quelques semaines du coup d’envoi, dans quel état d’esprit se trouve votre équipe ?
Tout va bien sur le plan mental en vue du tournoi. Nous avons déjà disputé deux matchs contre la RD Congo, que nous avons remportés 2-1 puis 3-1. Nous avons donc mis toutes les chances de notre côté. Nos joueuses sont prêtes et toute la Tanzanie est mobilisée pour cette CAN.
Quinze ans après votre dernière participation, la Tanzanie signe un grand retour en phase finale de la CAN Féminine. Qu’est-ce qui a permis ce retour ?
C’est vrai. Notre dernière participation remonte à 2010, en Afrique du Sud. Cela fait donc 15 ans. Depuis, nous avons tout changé dans le football féminin pour relancer notre équipe nationale, les Twiga Stars.
Nous avons mis en place un programme spécial pour le développement du football féminin, en commençant par les jeunes. Nous avons d’abord structuré les équipes U17, ce qui nous a permis de nous qualifier pour la Coupe du Monde U17.
C’était la feuille de route vers la reconstruction de nos Twiga Stars. Et vous avez pu constater ces dernières années notre progression : nous avons battu des équipes comme la Côte d’Ivoire, le Togo, et tout récemment la Guinée équatoriale. Cela montre combien le football féminin tanzanien a évolué.
Et justement, la bonne nouvelle récente, c’est la qualification de votre équipe nationale féminine de futsal pour la prochaine Coupe du Monde. Que représente cette performance ?
Je suis très heureux de cette qualification. Mais il faut savoir que le futsal n’est pas encore structuré comme une discipline à part entière dans notre pays.
La plupart des joueuses de l’équipe viennent du football à 11. Le sélectionneur a su, en très peu de temps, adapter les joueuses au futsal. Et elles ont très bien joué lors du tournoi.
Finalement, cette qualification montre aussi les progrès réalisés dans le football à 11, car c’est là que ces joueuses ont été formées.
Vous avez longtemps travaillé avec les équipes de jeunes, notamment les U17. Comment avez-vous construit un pont entre ces catégories et l’équipe senior ?
Tout à commencé avec les U17. C’était notre feuille de route pour reconstruire notre équipe A.
Nous avons travaillé très dur avec les U17, les U20 et les seniors. Nous avons aménagé un vrai parcours : les joueuses U17 peuvent intégrer les U20, et celles des U20 montent ensuite en équipe première.
Ce programme, lancé en 2019, nous a permis de poser des bases solides. Aujourd’hui, si nous participons à cette CAN, c’est grâce à ce travail réalisé avec les équipes de jeunes.
Y a-t-il un entraîneur ou une figure du football qui vous a particulièrement inspiré dans votre parcours ?
En fait, je suis inspiré par toutes les femmes entraîneures, surtout en Afrique.
Quand on veut progresser dans le football féminin, il faut apprendre des autres. Je fais de mon mieux pour observer ce que font les grandes entraîneures africaines, notamment en Afrique du Sud, au Maroc et ailleurs.
Donc pour moi, ce sont elles ma source d’inspiration.
Quel est votre rêve ou votre grande ambition avec cette équipe nationale féminine ?
Notre ambition, c’est de participer à la Coupe du Monde. Cette CAN 2024 est une étape importante pour acquérir de l’expérience et se préparer pour le Mondial.
Si nous parvenons à battre l’Éthiopie lors des qualifications, nous pourrons poursuivre notre progression.
Donc notre objectif, c’est d’abord d’apprendre des meilleures équipes, mais surtout de battre l’Éthiopie pour espérer nous qualifier pour la Coupe du Monde féminine 2027. C’est là que se joue notre rêve.
Et pour conclure, quel message souhaitez-vous adresser aux supporters à l’approche de cette CAN ?
La CAN Féminine est un tournoi très important pour le football féminin en Afrique. J’aimerais dire à tout le monde de porter attention au football féminin, car il a besoin du soutien du plus grand nombre.
Et pour les Tanzaniens, je leur demande de soutenir leur équipe nationale afin que nous puissions donner le meilleur durant ce tournoi.