CAN Féminine : Esther Okoronkwo en mode super-sub

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C’est ce qu’on appelle soigner son entrée. À la pause, le Nigeria mène 2-0 face à la Tunisie, au stade Larbi Zaouli de Casablanca, mais peine à convaincre. Le score est flatteur, la maîtrise relative, et Asisat Oshoala – buteuse mais encore en manque de rythme – reste aux vestiaires, pour la seconde mi-temps. Justin Madugu, le sélectionneur nigérian, choisit alors de lancer Esther Okoronkwo. Un changement qui, sans faire de bruit, va faire basculer le match.

En quarante-cinq minutes, l’attaquante de 27 ans a mis le feu sur son côté. Percutante, mobile, constamment entre les lignes, elle a étiré le bloc tunisien, créé des brèches, provoqué des fautes et offert un caviar à Chinwendu Ihezuo sur le troisième but (84e). À défaut d’avoir marqué, elle a redonné à l’attaque nigériane son mordant.

« Peu importe où je commence, ce qui compte, c’est l’impact que j’ai sur le jeu », glisse-t-elle en zone mixte, sourire large et maillot trempé, le regard encore allumé de l’adrénaline du terrain.

Un profil atypique, une efficacité maximale

Dès sa première prise de balle, Okoronkwo impose un autre tempo. Elle décroche, fixe, joue simple. Elle donne de l’air à l’équipe, oblige la défense tunisienne à se réorganiser. À la 73e minute, elle est à l’origine du troisième but : une percée côté gauche, un centre en retrait millimétré, et Uchenna Kanu qui conclut sans trembler.

« C’est ce que j’attends d’elle », lâche Madugu en conférence de presse. « Elle n’a pas besoin de marquer pour être importante. Elle sait lire le jeu, elle sent les bons coups, elle crée des opportunités. »

Statistiquement, son impact est net. En une mi-temps, elle touche 24 ballons, réussit 88 % de ses passes, obtient trois fautes, crée deux occasions franches et délivre une passe décisive. Son activité tranche avec celle d’Oshoala, plus statique malgré son but.

 

 

« Ce que j’aime chez Esther, c’est sa capacité à s’adapter. Elle peut jouer seule en pointe, sur un côté, ou en soutien. Elle ne râle jamais, elle bosse, et quand elle entre, elle fait toujours la différence », confie Ngozi Okobi, cadre du groupe nigérian.

Preuve de son influence ? Elle est repartie avec le trophée de Joueuse du Match TotalEnergies. Un fait suffisamment rare pour être souligné, tant il est inhabituel qu’une remplaçante honorée d’un tel titre. Mais dimanche soir, il n’y avait pas débat.

L’œil de Desire Oparanozie : « Elle a changé le match »

Présente dans les tribunes du stade Larbi Zaouli, l’ancienne Super Falcons Desire Oparanozie n’a rien manqué du récital d’Okoronkwo. Et elle ne tarit pas d’éloges.

« Pour moi, elle est la femme du match. Quand elle entre, on passe d’une attaque à trois têtes coupées à un vrai collectif. Elle décroche, elle fixe, elle libère les autres. Elle a changé le match sans même marquer. »

L’ancienne joueuse de Guingamp, qui connaît bien le poste d’avant-centre, insiste sur un détail : les appels sans ballon.

« Ses courses entre les lignes font mal. Elle attire deux défenseuses, ce qui ouvre l’espace à Ijamilusi et Ihezuo. On ne le voit pas toujours à la télé, mais sur le terrain, c’est flagrant. »

Avec ce genre de performances, Esther Okoronkwo n’est peut-être plus très loin de bousculer la hiérarchie établie. Et si elle commence toujours sur le banc, c’est peut-être tout simplement parce qu’elle sait en sortir mieux que personne.