Roselene Khezami, le roc qui a fait plier le Nigeria

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Au coup de sifflet final à Casablanca, Roselene Khezami n’a pas explosé de joie. Pas de gestes théâtraux, pas de larmes, juste une sérénité rare. Mais à l’intérieur, tout bouillonnait. La défenseure centrale de 23 ans venait de signer avec l’Algérie un nul fondateur contre le Nigeria (0-0), neuf fois champion d’Afrique, synonyme de première qualification historique pour les quarts de finale de la CAN Féminine CAF TotalEnergies.

Pour un pays qui, depuis sa première participation en 2004, n’avait jamais dépassé la phase de groupes, l’exploit est immense. Et au cœur de cette révolution tranquille, il y a elle : Roselène Khezami, pilier discret, lucide et tenace.

« C’était un grand match, un vrai travail d’équipe. Ce résultat, c’est notre union, notre solidarité », confie-t-elle à la sortie du vestiaire.
« On veut aller encore plus loin, viser les demi-finales. Oui, on a déjà perdu, mais on apprend. La prochaine fois, on essaiera même de marquer contre le Nigeria. »

De la France à l’Algérie : un choix de cœur

Née à Marseille, formée dans les sélections jeunes de la France (U16, U17), Roselène aurait pu poursuivre dans le giron tricolore. Mais en 2021, elle opère un virage fort : représenter l’Algérie, le pays de ses origines. Un choix assumé, qui va changer sa trajectoire — et celle de toute une sélection.

Calme sous pression, toujours juste dans ses relances, profondément attachée à son identité, Khezami s’est rapidement imposée comme une joueuse cadre dans une équipe en pleine métamorphose.

 

Latérale de formation, patronne dans l’axe

À ses débuts en sélection, elle évoluait sur le flanc gauche. Mais son intelligence de jeu et sa sérénité n’échappent pas à Farid Benstiti. Le sélectionneur décide de la repositionner dans l’axe, avec une intuition qui va s’avérer payante.

« En deux ans, elle a énormément progressé », salue Benstiti.
« Elle jouait arrière gauche avec d'autres qualités, mais j’ai vu en elle un profil idéal pour l’axe. Ce n’est jamais simple de changer un poste, mais elle a une vraie intelligence de jeu. Elle est brillante. »

Depuis ce choix tactique, Roselène Khezami est devenue la tour de contrôle de la défense algérienne. Contre le Nigeria, elle a livré une copie clinique : 90 minutes pleines, 30 passes réussies, 2 interventions décisives. Zéro erreur.

Le sable avant le gazon : une école atypique

Avant de briller sur le rectangle vert, Roselene s’est révélée… sur le sable. Avec le club de beach soccer de Marseille, elle inscrit trois buts en dix matches — un parcours atypique pour une défenseure. Mais derrière l’anecdote, une vraie école technique.

« J’ai dû mettre entre parenthèses mon aventure avec le club de beach soccer à cause de mon contrat pro. Mais je continue à m’entraîner avec eux pendant les vacances. J’aimerais y revenir après ma carrière. »

Agilité, lecture des espaces, précision dans le jeu court… Autant d’atouts cultivés sur les plages, et que l’on retrouve désormais au cœur de la défense des Fennecs.

Tenir tête au cadre nigérian

Avant cette rencontre, le bilan était sans appel : six défaites en six matches contre le Nigeria, 19 buts encaissés, un seul marqué. Mais ce 12 juillet à Casablanca, l’Algérie a brisé la spirale. Ensemble. Sans complexe.

Le Nigeria a poussé, dominé, frappé. Mais jamais les portes ne se sont ouvertes. Derrière le rideau algérien, Khezami s’est tenue droite, impassible. Et quand l’arbitre a mis fin au combat, c’est une équipe entière qui s’est effondrée de bonheur. La malédiction était vaincue.

Un nouveau chapitre s’ouvre

Ce nul n’est pas qu’un point. Il est un symbole. Celui d’une génération qui refuse l’héritage de l’échec. Et Roselene Khezami, dans sa posture calme, est l’une des figures de cette renaissance.

De la plage de Marseille aux pelouses marocaines, son parcours dit beaucoup de courage, de choix forts, de leadership. Et demain ? L’Algérie rêve à voix haute. Et dans ses rêves, il y a toujours cette numéro 5, sobre, lucide, inflexible.

La Coupe d'Afrique des Nations Féminine CAF TotalEnergies  retiendra peut-être le nom d’une nouvelle étoile. Roselène Khezami, le roc qui a fait basculer l’histoire.