Taye Taiwo : “J’ai lancé ma carrière en gagnant la CAN U-20”

Il y a 20 ans, Taye Taiwo, alors âgé de 20 ans, voyait sa carrière prendre un tournant majeur : une signature à l’Olympique de Marseille, un titre à la CAN U-20 et une finale de Coupe du Monde U-20 avec le Nigeria, où il décroche le Ballon de bronze, derrière Lionel Messi et son compatriote John Obi Mikel. Avant de se révéler au monde, c’est sur la scène africaine que le latéral gauche a posé les bases de son ascension, jouant un rôle clé dans le triomphe des Flying Eagles lors de la CAN U-20 CAF TotalEnergies 2005.
Ce tournoi restera un moment charnière dans sa trajectoire. Aux côtés d’une génération dorée menée par John Obi Mikel, Isaac Promise et Chinedu Obasi, Taiwo s’est illustré par sa puissance physique, sa frappe surpuissante et son leadership naturel. Sous la direction de Samson Siasia, les Nigérians ont survolé la compétition avec un jeu flamboyant et une efficacité redoutable. En finale, ils s’imposent 2-0 face à l’Égypte, décrochant ainsi leur cinquième titre continental et validant leur qualification pour la Coupe du Monde U-20 aux Pays-Bas.
Ce sacre africain fut bien plus qu’une simple victoire pour Taiwo : il représentait la confirmation qu’il était prêt pour le très haut niveau. Son impact défensif, sa capacité à dynamiter les défenses adverses sur coups de pied arrêtés et son endurance hors normes ne sont pas passés inaperçus. Pour celui qui venait de rejoindre Marseille, cette CAN U-20 2005 fut une étape fondatrice, lui ouvrant la voie vers l’élite du football mondial, où il brillera en atteignant la finale de la Coupe du Monde de la catégorie.
Dans cet entretien, il partage ses souvenirs de cette période décisive, les défis surmontés et l’influence de ce sacre sur le reste de sa carrière.
CafOnline.com : En 2005, vous avez disputé la Coupe d'Afrique des Nations U-20 au Bénin. Dans quel état d'esprit étiez-vous avant le tournoi ?
Taye Taiwo : Avec l'équipe que nous avions à l'époque, nous avons travaillé très dur. Ce n'était pas évident, mais nous avions la chance d'être encadrés par un entraîneur d'expérience, Samson Siasia, qui avait lui-même joué au plus haut niveau, en gagnant la CAN senior en 1994. Avant de partir pour le Bénin, nous nous sommes réunis à Lagos pour nous préparer. Il y avait une grande concurrence au sein du groupe : certains joueurs venaient, d'autres partaient, mais ceux qui sont restés ont formé une véritable famille. C'est cet esprit de cohésion qui nous a permis d'aller loin dans la compétition.
Quelles étaient les attentes autour de cette équipe avant le tournoi ?
Avant notre départ pour le Bénin, beaucoup de Nigérians doutaient de nous. Certains pensaient que nous pourrions gagner, d'autres non. Mais nous avions foi en notre potentiel. Nous avons travaillé dur et bénéficié du soutien inconditionnel de notre entraîneur, qui nous a inculqué une mentalité de conquérants. En arrivant au Bénin, nous étions déterminés à montrer notre supériorité sur le terrain et à aller chercher le titre. Notre ambition était claire : nous étions là pour gagner.
Lors du premier match, vous avez marqué le premier but du Nigeria contre le pays hôte, le Bénin (victoire 3-0). Comment avez-vous vécu ce moment ?
C'était un moment exceptionnel pour moi. Jouer une Coupe d'Afrique des Nations U-20 est une opportunité immense pour un jeune joueur. Ces tournois de jeunes sont une vitrine incroyable : l’Afrique entière regarde, et c'est l'occasion de se faire remarquer. Marquer lors du premier match a été une immense fierté. C'est là que j'ai compris à quel point il était important de saisir chaque instant sur le terrain.
D'après vous, qu'est-ce qui a fait la force du Nigeria lors de cette compétition ?
Notre collectif ! Nous avions des joueurs talentueux comme John Obi Mikel, qui était très fort au milieu de terrain. L'équipe était bien équilibrée : nous avions des défenseurs solides, des milieux qui savaient garder le ballon et des attaquants efficaces. Chacun connaissait son rôle. Nous défendions ensemble, nous attaquions ensemble. C'est cette unité qui nous a permis d'être champions d'Afrique.
Que représente ce titre de champion d'Afrique U-20 pour vous ?
C’est un rêve devenu réalité. Quand j'étais gamin, je jouais pieds nus dans les rues de mon quartier, en regardant les grands joueurs comme Jay-Jay Okocha ou Nwankwo Kanu à la télévision. J’ai toujours rêvé de porter le maillot de l'équipe nationale. Gagner ce titre a été une étape essentielle dans ma carrière. Je savais que c'était une opportunité à ne pas manquer, et j’ai tout donné pour en profiter.
Comment avez-vous célébré ce titre ?
C'était incroyable ! En rentrant au Nigeria, nous avons reçu un accueil triomphal. Des milliers de personnes nous attendaient. Même le président nous a reçus. Nous avons partagé un repas avec lui, et il nous a félicités pour notre parcours. Certains joueurs ont ensuite signé des contrats à l'étranger, tandis que d’autres sont restés au pays. C'était le début d’une nouvelle étape pour chacun de nous.
Quelques mois plus tard, vous partez pour la Coupe du Monde U-20 aux Pays-Bas avec le statut de champions d'Afrique. Quelles étaient vos ambitions ?
Nous étions très motivés. Le staff a pris la décision de garder l'ossature de l'équipe qui avait gagné la CAN U-20. Nous voulions aller le plus loin possible. Notre entraîneur nous avait prévenus que la Coupe du Monde était un niveau au-dessus. En Europe, les terrains sont différents, les arbitres sont plus stricts, et chaque erreur peut coûter cher. Nous avons beaucoup travaillé la discipline défensive et analysé les vidéos des équipes adverses. Nous étions prêts à relever le défi.
Votre parcours a été impressionnant : victoire contre l’Ukraine(1-0) en huitième, contre les Pays-Bas (1-1, 10 tab 9) en quart et le Maroc (3-0) en demi-finale. Puis vient la finale contre l'Argentine et un certain Lionel Messi.
Oui, et ce qui était fou, c'est que nous partagions le même hôtel que les Argentins. Nous les croisions au restaurant, nous les observions. Nous étions prêts pour la finale. Malheureusement, nous avons concédé deux penalties transformés par Messi (2-1). Il était déjà impressionnant à cet âge. Nous avons tout donné, mais nous avons manqué de réussite. L’Argentine était une très grande équipe, avec des joueurs comme Sergio Agüero. Nous étions déçus, mais fiers de notre parcours.
Quand vous regardez en arrière, quel regard portez-vous sur cette année 2005 ?
C'était une année inoubliable. J’ai signé à l’Olympique de Marseille, mon premier club européen puis j’ai gagné la CAN U-20 et atteint la finale d’une Coupe du Monde, c’est quelque chose que peu de joueurs vivent. Cette équipe restera toujours spéciale pour moi. La Coupe d’Afrique des Nations U-20 a lancé ma carrière. J’en garde des souvenirs incroyables et une grande fierté.