Lamia Boumehdi (TP Mazembe) : “Porter le statut de champion d’Afrique implique de l’accepter pleinement et de le convertir en moteur de motivation pour l’équipe.”

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  • Le TP Mazembe aborde la Ligue des Champions Féminine CAF 2025 en tant que tenant du titre, fort d’un sacre historique au Maroc l’année dernière
  • Malgré un effectif largement remanié, Lamia Boumehdi mise sur la cohésion, la détermination et de nouvelles recrues ambitieuses pour défendre son trophée
  • Cette édition ouvre la voie à la première Coupe des Championnes de la FIFA, donnant un enjeu supplémentaire et inédit à la compétition africaine

Le TP Mazembe arrive en position de favori pour la Ligue des champions féminine CAF 2025 après avoir marqué l’histoire du football africain féminin en 2024. La saison dernière, au Maroc, les « Corbelles » ont décroché leur premier titre continental en battant l’AS FAR 1-0 lors d’une finale tendue et disputée. Cette victoire, obtenue grâce à une performance collective solide et une gestion parfaite des moments clés, avait mis en lumière la capacité du TP Mazembe à rivaliser avec les meilleures équipes du continent.

Pour Lamia Boumehdi et son staff, ce sacre a été la confirmation que leur projet, basé sur la discipline, la technique et la détermination, pouvait rivaliser avec les clubs les plus expérimentés. Mais le succès apporte son lot de défis : la compétition 2025 se prépare dans un contexte inédit, avec un championnat national congolais qui n’a pas encore démarré, et un effectif profondément renouvelé. Huit joueuses ayant contribué au titre sont parties vers l’Europe, l’Amérique et l’Asie, laissant place à de nouvelles recrues désireuses de laisser leur empreinte.

Au-delà du continent, cette édition prend une dimension historique. La gagnante représentera l’Afrique lors de la première Coupe du Monde féminine des clubs de la FIFA en Angleterre. Pour le TP Mazembe, il ne s’agit pas seulement de défendre un titre, mais de porter les couleurs de tout un continent sur la scène mondiale. Entre héritage, renouveau et ambition internationale, le club congolais se prépare à écrire un nouveau chapitre de son histoire.


CAFonline.com : Comment jugez-vous la préparation de votre équipe à l’approche de cette nouvelle édition de la Ligue des Champions Féminine de la CAF ?
Lamia Boumehdi : Nous avons lancé notre préparation depuis plusieurs semaines et, dans l’ensemble, tout se déroule de manière positive. Le groupe répond bien aux exigences du staff technique. Nous avons mis l’accent sur le travail physique, la cohésion et la mise en place tactique, car nous savons que le niveau de la compétition sera très relevé. Le seul véritable obstacle concerne le contexte local : le championnat national n’a pas encore démarré. Cela signifie que nous serons la seule équipe à aborder la Ligue des champions sans avoir disputé le moindre match officiel cette saison. C’est un handicap, bien sûr, car rien ne remplace le rythme de la compétition. Mais nous essayons de compenser cela par des matchs amicaux et un travail intense à l’entraînement.

Comment décririez-vous l’état d’esprit de votre groupe avant le tournoi ?
L’état d’esprit est excellent, malgré un grand renouvellement dans l’effectif. Nous avons perdu huit joueuses importantes, parties vers l’Europe, l’Amérique ou encore la Chine. Ce sont des départs naturels, car ces filles ont gagné en visibilité grâce à nos succès et souhaitent franchir un cap. Nous respectons cela, car le TP Mazembe se veut un club formateur et ambitieux, plus grand que n’importe quelle individualité. En parallèle, nous avons recruté des joueuses prometteuses et engagées, qui ont conscience de la responsabilité qui les attend : défendre le titre continental. Le groupe s’est rapidement soudé, et je sens une vraie envie de prouver que Mazembe reste une grande équipe, capable de se renouveler sans perdre son identité.

Le TP Mazembe débute cette édition en tant que tenant du titre. Comment gérez-vous cette pression supplémentaire ?
Porter le statut de championne d’Afrique, c’est un privilège, mais aussi une charge supplémentaire. Nous savons que toutes les équipes voudront nous battre. Chaque adversaire abordera son match contre Mazembe comme une finale. Cette pression, nous devons l’assumer et la transformer en motivation. L’expérience que nous avons acquise lors de la dernière édition nous aidera à mieux gérer ces moments. Nous devons rester humbles, concentrées et prêtes à tout donner pour montrer que notre sacre n’était pas un hasard. Personnellement, je rappelle souvent aux joueuses que défendre un titre est plus difficile que de le conquérir. C’est là que se mesure la grandeur d’un groupe.

En tant qu’entraîneure expérimentée, quel regard portez-vous sur l’évolution du football féminin en Afrique ?
Le football féminin africain est en pleine transformation. Depuis quelques années, on observe une réelle volonté de structurer les compétitions, de former les entraîneurs et de professionnaliser les clubs. La CAF joue un rôle majeur dans ce processus, notamment avec la création de la Ligue des champions féminine, qui a donné une visibilité sans précédent aux joueuses du continent. Aujourd’hui, les mentalités évoluent, les infrastructures s’améliorent et de plus en plus de jeunes filles rêvent de devenir footballeuses professionnelles. C’est une évolution que je trouve magnifique. Mais il faut continuer à investir, notamment dans les catégories de jeunes, pour assurer la pérennité de cette progression.



Vous venez d’être à nouveau nominée aux CAF Awards, dans la catégorie “Entraîneure de l’année – football féminin”. Félicitations. Que représente pour vous cette nouvelle nomination ?

C’est un immense honneur et une grande fierté, surtout en tant que femme et en tant qu’Africaine. Être reconnue par la CAF parmi les meilleures entraîneures du continent, cela signifie que notre travail est vu et apprécié. Ce n’est pas seulement une récompense personnelle, c’est aussi une reconnaissance pour tout le staff, pour les joueuses et pour le club. Le TP Mazembe est une institution, et je suis heureuse de contribuer à écrire une nouvelle page de son histoire, côté féminin. Cette nomination me pousse à redoubler d’efforts, à continuer d’apprendre et à inspirer d’autres femmes à croire en leurs capacités.

Comment votre staff et votre club ont-ils réagi à cette annonce ?
La réaction a été très chaleureuse. La présidente, le staff technique, le personnel administratif et bien sûr les joueuses étaient tous ravis. Chez Mazembe, nous travaillons comme une famille, et chaque réussite individuelle est vécue comme une victoire collective. Cette nomination a apporté une belle énergie dans le groupe. Elle nous motive encore davantage à rester concentrées sur nos objectifs, notamment celui de conserver la Ligue des champions. C’est aussi un signe fort que le travail bien fait finit toujours par être reconnu.



Cette édition de la Ligue des Champions a une saveur particulière, puisque la gagnante représentera l’Afrique à la première Coupe des Championnes de la FIFA. Que ressentez-vous face à cette perspective mondiale ?

C’est un tournant historique pour le football féminin. La création de la Coupe du Monde des clubs va donner une nouvelle dimension à notre discipline. Savoir que la gagnante de cette Ligue des champions portera les couleurs de toute l’Afrique sur la scène mondiale est une motivation extraordinaire. Cela va pousser les clubs à se structurer encore plus sérieusement, à investir dans la formation, les infrastructures et la performance. Pour les joueuses, ce sera une occasion unique de se confronter à ce qui se fait de mieux dans le monde. Nous, à Mazembe, nous voulons rêver grand et représenter dignement notre continent. Cela nous pousse à travailler chaque jour avec encore plus de rigueur.

Enfin, un mot pour vos supporters ?
Je veux avant tout leur dire merci. Les supporters du TP Mazembe sont incroyables. Ils nous soutiennent dans les bons comme dans les moments plus difficiles, et leur passion est une source d’énergie constante. Chaque victoire, chaque titre, c’est aussi pour eux. Nous savons que leurs attentes sont grandes, et nous ferons tout pour leur offrir à nouveau la joie d’un sacre continental. J’espère qu’ils continueront à croire en nous, à venir nombreux au stade et à porter fièrement les couleurs de Mazembe. Leur force est la nôtre.